Etes-vous « créatif culturel »?
Ils mangent bio, consomment durable et fascinent les stratèges du marketing. Portrait d'une avant-garde très convoitée
C'est une tribu au nom malsonnant, dont vous êtes peut-être membre sans le savoir. On les appelle « créatifs culturels », et s'ils ne font pas la une des journaux, les cabinets de tendance planchent très sérieusement sur leurs us et coutumes. A la pointe du buycott ( l'achat responsable ), les « créa cul » mangent plus de légumes que de viande, achètent souvent bio, souvent équitable, privilégient les lessives écolos, les ampoules basse consommation et n'aiment ni les emballages ni le dernier cri en matière de high-tech. Ils regardent peu la télé, lisent des romans, pratiquent le bénévolat et les activités artistiques...
Grande est la tentation de réduire cet escadron vertueux à une énième variante des bobos. Mais voilà : leur existence est attestée par une très sérieuse enquête sociologique, qui fut d'abord menée aux Etats-Unis à la fin des années 1990. Un peu par hasard, Paul H. Ray et SherryAnderson découvrent cette catégorie de citoyens qui, sans s'être concertés, inventent une culture commune de vie et de consommation ( d'où « création culturelle ») hors des clous de l'American way of life . Selon les deux chercheurs, ces énergumènes représenteraient quand même un quart de la population yankee.
Leur livre ( 1 ), paru en 2000, a donné des idées à une fondation européenne, le Club de Budapest : importer le questionnaire sur le Vieux Continent, pour voir si la proportion est la même. Les résultats de l'enquête hexagonale, supervisée par le sociologue Jean-Pierre Worms, viennent de tomber ( 2 ). Ils révèlent que, chez nous, les « créa cul » représentent, en comptant large, 38 % des citoyens. Un chiffre énorme... mais pas tant que ça.
Car les créatifs culturels ne sont pas des fanatiques. Et si, dans leurs rangs, on trouve des adeptes de la décroissance, ce mouvement écolo radical qui prône de consommer moins pour épargner la planète, l'étude montre un tout autre visage : celui de personnes soucieuses surtout de consommer différemment. Une philosophie partagée par une mouvance, le Mouvement Vraiment durable ( MVD ) un think tank français de pro motion du développement durable, qui a un parrain de marque, le philosophe Gilles Li povetsky, grand théoricien de l' « hyperconsommation ». Leur credo, résumé par le président du MVD, Alexis Botaya : « Les décroissants posent les bonnes questions mais, soyons honnêtes , donnent des réponses impraticables. Peut-être que, dans le futur, on consommera moins. En attendant, il faut surtout tâcher de consommer mieux. »
Une idée prônée outre-Atlantique par les nombreux adeptes du site d'information écolo treehugger. com, que les médias américains surnomment la « CNN verte ». Leur gourou, le beau Graham Hill, a un objectif clair : « Améliorer votre qualité de vie tout en réduisant les impacts négatifs sur l'environnement . » En somme, le beurre ( bio ) et l'argent du beurre.
( 1 ) « L'Emergence des créatifs culturels », Editions Yves Michel. ( 2 ) « Les Créatifs culturels en France », Editions Yves Michel.
Arnaud Gonzague
Le Nouvel Observateur
C'est une tribu au nom malsonnant, dont vous êtes peut-être membre sans le savoir. On les appelle « créatifs culturels », et s'ils ne font pas la une des journaux, les cabinets de tendance planchent très sérieusement sur leurs us et coutumes. A la pointe du buycott ( l'achat responsable ), les « créa cul » mangent plus de légumes que de viande, achètent souvent bio, souvent équitable, privilégient les lessives écolos, les ampoules basse consommation et n'aiment ni les emballages ni le dernier cri en matière de high-tech. Ils regardent peu la télé, lisent des romans, pratiquent le bénévolat et les activités artistiques...
Grande est la tentation de réduire cet escadron vertueux à une énième variante des bobos. Mais voilà : leur existence est attestée par une très sérieuse enquête sociologique, qui fut d'abord menée aux Etats-Unis à la fin des années 1990. Un peu par hasard, Paul H. Ray et SherryAnderson découvrent cette catégorie de citoyens qui, sans s'être concertés, inventent une culture commune de vie et de consommation ( d'où « création culturelle ») hors des clous de l'American way of life . Selon les deux chercheurs, ces énergumènes représenteraient quand même un quart de la population yankee.
Leur livre ( 1 ), paru en 2000, a donné des idées à une fondation européenne, le Club de Budapest : importer le questionnaire sur le Vieux Continent, pour voir si la proportion est la même. Les résultats de l'enquête hexagonale, supervisée par le sociologue Jean-Pierre Worms, viennent de tomber ( 2 ). Ils révèlent que, chez nous, les « créa cul » représentent, en comptant large, 38 % des citoyens. Un chiffre énorme... mais pas tant que ça.
Car les créatifs culturels ne sont pas des fanatiques. Et si, dans leurs rangs, on trouve des adeptes de la décroissance, ce mouvement écolo radical qui prône de consommer moins pour épargner la planète, l'étude montre un tout autre visage : celui de personnes soucieuses surtout de consommer différemment. Une philosophie partagée par une mouvance, le Mouvement Vraiment durable ( MVD ) un think tank français de pro motion du développement durable, qui a un parrain de marque, le philosophe Gilles Li povetsky, grand théoricien de l' « hyperconsommation ». Leur credo, résumé par le président du MVD, Alexis Botaya : « Les décroissants posent les bonnes questions mais, soyons honnêtes , donnent des réponses impraticables. Peut-être que, dans le futur, on consommera moins. En attendant, il faut surtout tâcher de consommer mieux. »
Une idée prônée outre-Atlantique par les nombreux adeptes du site d'information écolo treehugger. com, que les médias américains surnomment la « CNN verte ». Leur gourou, le beau Graham Hill, a un objectif clair : « Améliorer votre qualité de vie tout en réduisant les impacts négatifs sur l'environnement . » En somme, le beurre ( bio ) et l'argent du beurre.
( 1 ) « L'Emergence des créatifs culturels », Editions Yves Michel. ( 2 ) « Les Créatifs culturels en France », Editions Yves Michel.
Arnaud Gonzague
Le Nouvel Observateur
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